Sensibilisation et échanges avec les parlementaires pour des régimes fonciers conciliants
Aujourd’hui à 16 millions d’habitants, la population sénégalaise avoisinerait 25 000 000 en 2035 et 35 000 000 d’habitants en 2050. Comment allons-nous vivre, sachant que le foncier sera plus réduit avec les questions de salinisation des sols, le développement des infrastructures, le besoin de superficie ?
Pour préparer les acteurs et décideurs à faire face à ces enjeux et défis, le Réseau d’Excellence sur la Gouvernance foncière en Afrique de l’Ouest francophone (NELGA-AOF), le REPES et le HCCT, en collaboration avec leurs partenaires (GIZ, IPAR, CNCR, SAED, UCAD, ANAT) a organisé, du 13 au 14 mai 2022, à Saly, un atelier national qui vise à échanger et sensibiliser les parlementaires sur les enjeux et les défis de la réforme foncière au Sénégal.
Plus spécifiquement, il s’agira, en plus de renforcer les parlementaires en leadership et procédures législatives en matière foncière, de les positionner comme des acteurs incontournables dans la protection des droits fonciers des citoyens et la lutte contre les accaparements de terres. L’activité vise, en outre, à informer et sensibiliser les parlementaires sur les projets fonciers et les tentatives de réforme en cours, de susciter de nouvelles attitudes auprès des élus dans le suivi de la mise en œuvre des projets fonciers. Il sera aussi question de les sensibiliser sur les nouveaux outils d’aménagement du territoire (PNADT, LOADT et SCADT) ainsi que sur les « fonciers oubliés » (pastoral, halieutique, minier, etc.), dans un contexte de découverte du pétrole et du gaz. Enfin, l’atelier s’attachera à identifier les axes et activités de plaidoyer des parlementaires à l’épreuve des tentatives de réformes foncières inachevées.
Poursuivre le dialogue amorcé en 2020 et suivre l’évolution des engagements
La rencontre s’inscrit dans le sillage d’un premier atelier national tenu en octobre 2020 à Saly avec les parlementaires et les membres du Haut Conseil des Collectivités territoriales (HCCT), dans le but d’initier un dialogue entre les décideurs politiques et les universitaires sur les enjeux de la gouvernance foncière et la relance de la réforme foncière. Des questions clefs sur la gouvernance foncière qui interpellent les parlementaires ont été recensées, lors de cette rencontre. De même, des engagements ont été pris par le REPES en vue de faire un plaidoyer au sein du parlement dans une perspective de relance de la réforme foncière.
Par ailleurs, les parlementaires ont retenu de relever les défis liés aux questions clés à fort enjeux tels que le changement climatique, les investissements agricoles à grande échelle, les conflits fonciers, etc.
Il s’agira, dès lors, pour ce second rendez-vous, avec les parlementaires et les hauts conseillers, de poursuivre les discussions déjà entamées, mais également de suivre l’évolution des engagements contenus dans la feuille de route signée lors de la première rencontre afin d’accompagner le processus.
Un contexte politique favorable
Engagé depuis les années 60 dans un processus de réforme foncière, le Sénégal peine toujours à trouver la bonne formule. La réforme opérée à travers la loi 64-46 de 1964, plus connue sous le nom de « loi sur le domaine national », rencontre des difficultés dans son application. Ces difficultés sont d’ordre juridique, socioéconomique, écologique et politique. En effet, la primeur donnée à la création d’espaces fonciers communautaires a engendré une tendance à l’attribution de parcelles à des bénéficiaires qui ne les mettent pas directement en valeur. Par ailleurs, l’Etat n’a pas réussi à contrecarrer la mainmise de particuliers (aristocratie foncière, familles maraboutiques) sur l’assiette foncière communautaire au détriment des petits exploitants familiaux.
Plus récente, la Loi d’orientation Agrosylvopastorale (LOASP), votée en 2004, préconise une logique capitaliste dans l’attribution du foncier et prône le développement de vastes unités de production modernes capables de répondre durablement à la demande en produits de toutes sortes. Son application pose également le problème de l’accaparement des terres par les agrobusinessmen.
Au regard des nombreuses controverses nées des tentatives de réforme et des enjeux, le NELGA-AOF a engagé ce processus avec le REPES et le HCCT pour inciter les parlementaires et les hauts conseillers à relancer la réforme foncière au Sénégal. Il s’agira de créer les conditions pour des régimes fonciers capables de concilier développement économique, exploitation agricole familiale paysanne viable, équité dans la répartition des terres et participation politique des paysans.
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Ce processus intervient dans un contexte où l’État du Sénégal s’est engagé dans une dynamique de promotion de la gouvernance locale et du développement territorial par la création du Haut Conseil des Collectivités Territoriales, mais également à travers la reconnaissance de nouveaux droits aux citoyens. Ces nouveaux droits, ont coïncidé avec l’élargissement des pouvoirs de l’Assemblée nationale en matière de contrôle de l’action gouvernementale et d’évaluation des politiques publiques.